Veille juridique du 19 novembre 2018
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Droit des affaires &Fiscalité
La Cour de justice européenne reconnaît l’intention d’acquérir une filiale comme suffisant pour déduire la TVA grevant les frais d’acquisition
Une société irlandaise avait l’intention d’acquérir la totalité des titres d’une seconde société exerçant la même activité qu’elle. Cependant, afin de préserver la concurrence, la réalisation de l’opération n’a pas été autorisée par la Commission européenne. Seuls 29% des titres de la société cible ont ainsi été acquis par la première société.
L’Administration fiscale irlandaise a refusé la déduction de la TVA grevant les frais que la société a engagés dans le cadre de l’opération d’acquisition, partiellement réalisée.
Le Cour de justice européenne rejette la position de l’Administration fiscale en fondant sa décision sur deux de ses courants jurisprudentiels bien établis.
Selon le premier, la société holding qui s’immisce dans la gestion de sa filiale est en mesure de déduire la TVA grevant ses frais généraux. Par suite, la TVA grevant les frais d’acquisition d’une filiale peut être déduite.
Ensuite la Cour européenne de justice se fonde sur sa jurisprudence selon laquelle la TVA grevant les actes préparatoires d’opérations soumises à la TVA est déductible.
En l’espèce, la Cour de justice européenne a donc reconnu le droit à la société irlandaise de déduire la TVA grevant les frais d’acquisition de la société cible, bien que l’opération n’ait pas abouti. Elle reconnaît ainsi le caractère d’assujettie de la société irlandaise.
Le droit de partage dû lors de la liquidation d’une société se calcule en excluant le montant du capital social
Un droit de partage est dû lors de la liquidation d’une société. Celui-ci se calcule sur le montant de l’actif net de la société liquidée. En l’absence de définition de l’actif net dans ce cadre, la question s’est posée de savoir s’il fallait y inclure le capital social ou non : il n’existe pas de disposition expresse qui vient définissant l’assiette du droit de partage dans le cadre d’une liquidation amiable de société.
En l’espèce la société en liquidation amiable avait acquitté le droit de partage sur l’ensemble des sommes allouées aux associés, y compris sur le montant du capital social. Le tribunal de grande instance de Paris et la Cour d’appel ont décidé le remboursement à la société des droits acquittés sur le montant du capital social.
Par une décision confirmative, la Cour de cassation a décidé d’exclure le capital social du montant pris en compte pour le calcul du droit de partage des articles 746 et 747 du Code général des impôts. Les juges, dans la présente affaire, ont assimilé la définition de l’actif net à celle donnée par l’article 1844-9 du Code civil qui exclut le capital social.
Cass.com, 26-09-2018 n°16.24070
Présentation des principales mesures fiscales de la loi relative à la lutte contre la fraude
La loi relative à la lutte contre la fraude a été publiée le 24 octobre 2018. Cette loi prévoit plusieurs mesures élargissant les pouvoirs et les moyens d’actions de l’Administration :
-Premièrement, en vertu du nouvel article 1740 A bis du CGI, les professionnels ayant contribué, dans le cadre de leur profession, à l’élaboration d’un montage frauduleux pourront être sanctionnés par une amende fiscale. L’objectif de cet article est de sanctionner les agissements qui ne pourront l’être pénalement sous le délit de fraude fiscale. Sont principalement visés par le texte les professionnels du droit et du chiffre (avocats fiscalistes, conseils juridiques, conseillers financiers, « les officines fiscales » …). L’amende est encourue en cas de sanction du contribuable pour manquement grave à ses obligations fiscales (majoration de 80%) et si le professionnel a fourni intentionnellement une prestation au contribuable ayant contribué à ledit manquement.
-Dans le cadre d’un contrôle fiscal, l’Administration sera en mesure d’utiliser la copie des fichiers informatiques du contribuable qu’elle aura conservée. En effet, en vertu de l’article L47 A du LPF l’administration peut copier les fichiers informatiques et en conserver une copie. Une deuxième copie est remise au contribuable ou à son représentant et est utilisée comme comparaison avec les déclarations fiscales effectuées. L’Administration pourra utiliser la copie conservée par elle et ce même en l’absence d’altération ou de non présentation de la copie conservée par le contribuable.
-Le recours à la procédure de flagrance par l’Administration a été assoupli et élargi par la loi. Deux cas de recours à cette procédure ont été ajoutés par la loi relative à la lutte contre la fraude fiscale. Le premier cas est le manquement à au moins deux obligations déclaratives au titre de la période échue (les obligations visées sont : la déclaration mensuelle de prélèvement à la source de l’IR par les employeurs, la déclaration annuelle d’ensemble des revenus, la déclaration annuelle des bénéfices professionnels soumis au régime du réel, la déclaration annuelle de résultat en matière d’impôt sur les sociétés, les déclarations de recettes en matière de TVA). Le deuxième cas de recours à la procédure de flagrance introduit par la loi est l’absence réitérée du respect d’au moins une des obligations déclaratives prévues à l’article 287,3 du CGI durant les deux dernières périodes échues.
-Les sanctions fiscales appliquées aux personnes morales dans le cadre d’infraction grave pourront désormais être publiées sur internet pour une durée maximum d’un an. Cette publication sera possible lorsqu’une personne morale sera sanctionnée pour une fraude d’un montant minimum de 50.000 euros et s’il y a eu recours à une manoeuvre frauduleuse au sens de l’article 1729 du CGI.
-La définition du territoire ayant un régime fiscal privilégié de l’article 238 A du CGI a été réforméen ce que pour être qualifié comme tel l’écart entre l’impôt acquitté à l’étranger et celui acquitté en France ne devra plus être d’au moins 50% mais de 40%.
-La loi a élargi la liste des États ou territoires non coopératifs de l’article 238-0 du CGIafin d’intégrer les États ou territoires figurant sur la liste « noire » européenne (Guam, les îles Vierges américaines, la Namibie, les Samoa, les Samoa américaines et Trinité-et-Tobago).
Droit social
La prime de treizième mois et le salaire payable sur 13 mois ne doivent pas être confondus
La Cour de cassation dans un arrêt du 17 octobre 2018 rappelle que le salaire payé le treizième mois ne peut être assimilé à la gratification conventionnelle appelée prime de treizième mois.
En l’espèce le contrat de travail du salarié requérant prévoyait que le salaire soit payé sur 13 mois. L’accord d’entreprise en vigueur au sein de l’entreprise, lui, mettait en place la prime de treizième mois. Le salarié demandait le paiement de cette prime.
La Cour d’appel a rejeté sa demande au motif que les deux ne peuvent se cumuler en ce qu’ils ont le même objet, la clause du contrat de travail établissant le treizième mois de salaire ne faisant que prévoir dans le contrat la prime conventionnelle de treizième mois d’après les juges du fond.
Selon la Cour de cassation le treizième mois de salaire constitue une modalité de règlement et non une gratification au même titre que la prime de treizième mois et qu’ainsi les deux ne doivent pas être confondus.