Veille juridique du 2 octobre 2017
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PRINCIPALES MESURES DU PROJET DE LOI DE FINANCES 2018
Présenté au conseil des ministres le 27 septembre, le projet de loi de finances pour 2018 a été déposé le même jour à l’Assemblée nationale. Il comporte une vingtaine d’articles fiscaux, dont ceux concernant la « flat tax » et l’impôt sur la fortune immobilière qui représentent chacun plus d’une dizaine de pages.
Voici une première présentation des mesures essentielles du projet :
Impôt sur le revenu
La revalorisation des limites des tranches du barème de l’impôt sur le revenu est une mesure traditionnelle du projet de loi de finances. Pour l’imposition des revenus de 2017, ces limites seraient revalorisées de 1 % (Projet art. 2).
Est également inscrite au projet la déductibilité de la CSG sur les revenus d’activité pour la fraction correspondante à la hausse annoncée de 1,7 point qui devrait être incluse dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018. Le supplément de CSG sur les revenus du capital serait déductible dans certains cas seulement (Projet art. 38).
Fiscalité patrimoniale
- ISF
L’impôt sur la fortune immobilière (IFI) remplacerait l’ISF à compter du 1er janvier 2018 (Projet art. 12). Codifié aux nouveaux articles 964 et suivants du CGI, l’IFI frapperait les actifs immobiliers non affectés à l'activité professionnelle de leur propriétaire dont la valeur nette excède 1.300.000,00 euros. Seraient concernés tous les biens et droits immobiliers, les parts de SCI à hauteur de la valeur représentative des immeubles et les parts des véhicules d’investissement spécialisés, y compris lorsqu’ils sont détenus via un contrat d’assurance-vie. L’abattement de 30 % sur la valeur de la résidence principale serait conservé.
Le barème de l’impôt serait identique au barème actuel de l’ISF et la réduction ISF-dons serait maintenue, de même qu’un plafonnement à 75 % des revenus de la somme de l’IFI et de l’impôt sur le revenu.
- Revenus du patrimoine
Mesure également largement annoncée, le prélèvement forfaitaire unique sur les revenus du capital (PFU), parfois dénommé « flat tax », entrerait en vigueur à compter du 1er janvier 2018. Contrairement au texte sur l’IFI, l’instauration de ce prélèvement serait réalisée par modification des dispositions actuelles du CGI (Projet art. 11).
Le taux du prélèvement serait fixé à 12,8 % auquel il convient d’ajouter les prélèvements sociaux, soit un taux global de 30 %. L’option pour une imposition au barème progressif resterait possible mais elle serait alors nécessairement globale pour tous les revenus et gains visés par le PFU.
D’une manière générale, les produits concernés par le PFU seraient les suivants :
- l’ensemble des revenus de capitaux mobiliers (intérêts, revenus distribués et revenus assimilés) et les revenus des plans et comptes épargne logement ouverts à compter de 2018 ;
- les produits des contrats d’assurance-vie afférents aux primes versées à compter du 27 septembre 2017 lorsque l’encours net total sur ces contrats excède 150 000 euros ;
- les gains de cession de valeurs mobilières et droits sociaux et autres revenus et gains assimilés.
Les régimes de faveur du Plan d’Epargne en Actions (PEA) et du PEA-PME ne seraient pas modifiés et les livrets A resteraient exonérés.
L’assiette des revenus et gains soumis au PFU sera constituée par le montant brut des revenus perçus ou des gains réalisés : l’abattement de 40 % sur les dividendes serait ainsi supprimé (il resterait applicable en cas d’imposition au barème progressif). S’agissant des gains de cession de valeurs mobilières et droits sociaux réalisés à compter de 2018, seraient également supprimés les abattements pour durée de détention. En cas d’option pour le barème progressif, l’abattement de droit commun et l’abattement renforcé (PME de moins de 10 ans) pourraient s’appliquer si les titres cédés ont été acquis avant 2018. Enfin, un nouvel abattement, non cumulable avec les précédents, pourrait bénéficier sous certaines conditions aux dirigeants de PME qui partent en retraite et cèdent leurs titres à compter de 2018, que le gain soit soumis au PFU ou au barème progressif.
Fiscalité des entreprises
Les mesures à destination des entreprises concernent :
- la modification de la trajectoire de la baisse du taux de l’IS, progressivement réduit à 25% d'ici à 2022 (Projet art. 41), suppression de la contribution de 3% sur les revenus distribués mis en paiement à compter de 2018 (Projet art. 13) et baisse à 6 % du taux du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) pour 2018 avant sa transformation en baisse de charges patronales à compter de 2019 (Projet art. 42). A noter que le crédit d’impôt de taxe sur les salaires bénéficiant à certains organismes serait également supprimé (Projet art. 43) ;
- la revalorisation des seuils d’application des régimes micro d’imposition des bénéfices (Projet art. 10) et l’exonération de cotisation minimum de Cotisation Foncière des Entreprises (CFE) pour les redevables réalisant un chiffre d’affaires inférieur à 5.000,00 euros (Projet art. 45) ;
Taxe d’habitation
Le projet de loi de finances met en œuvre la réforme de la taxe d’habitation sur la résidence principale, qui doit permettre à 80% des foyers fiscaux d'être dispensés de la taxe d'ici 2020 (Projet art. 3). Un nouveau dégrèvement de taxe s'appliquerait, pour les contribuables dont le revenu fiscal de référence est inférieur à un certain montant, au taux de 30 % en 2018, 65% en 2019 et 100% en 2020.
Taxe sur les carburants
Les mesures fiscales du projet de loi de finances vont alourdir de 7,6 centimes par litre les taxes sur le diesel. La convergence de la fiscalité entre le diesel et l'essence va commencer à se faire ressentir nettement sur le portefeuille des automobilistes. Une hausse de 10 % des taxes sur le diesel est prévue en 2018.
DROIT DES AFFAIRES / FISCALITÉ
Taux maximal d’intérêts déductibles des comptes courants d’associés
Pour le troisième trimestre 2017, le taux effectif moyen pratiqué par les établissements de crédit pour des prêts à taux variable aux entreprises, d'une durée initiale supérieure à deux ans, s'élève à 1,59 %.
Les intérêts servis aux associés ou aux actionnaires à raison des sommes qu'ils mettent à disposition de la société en sus de leur part du capital sont admis en déduction des résultats imposables dans la limite de la moyenne des taux effectifs moyens pratiqués par les établissements de crédit, pour des prêts à taux variable aux entreprises, d'une durée initiale supérieure à deux ans.
Pour le troisième trimestre 2017, le taux effectif moyen s’élève à 1,59 %.
Les sociétés qui arrêteront au cours du troisième trimestre 2017 un exercice clos du 30 septembre au 30 décembre 2017 inclus peuvent dès à présent connaître le taux maximal de déduction qu'elles pourront pratiquer au titre de cet exercice.
Pour les entreprises dont l'exercice est de 12 mois, le taux maximal d'intérêts déductibles pour les exercices clos à compter du 30 septembre 2017 est le suivant :
Exercices clos | Taux maximal |
Du 30 septembre au 30 octobre 2017 | 1, 73 % |
Du 31 octobre au 29 novembre 2017 | 1, 71 % |
Du 30 novembre au 30 décembre 2017 | 1, 69 % |
JO du 27 septembre 2017 (lien)
Possibilité d’obtention d’un titre exécutoire par un créancier antérieur à une déclaration d’insaisissabilité
Le créancier auquel la déclaration d’insaisissabilité d’un immeuble est inopposable bénéficie d’un droit de poursuite sur ce bien. Après la procédure collective de son débiteur, il peut obtenir un titre exécutoire par une action en constatation de l’existence de sa créance.
La déclaration d’insaisissabilité de la résidence principale d’un entrepreneur qui a été publiée avant le 8 août 2015 n'a d'effet qu'à l'égard des créanciers dont les droits naissent, après la publication, à l'occasion de l'activité professionnelle de l’entrepreneur (C. com. art. L 526-1 dans sa rédaction antérieure à la loi du 6-8-2015).
En 2010, un entrepreneur déclare devant notaire l’insaisissabilité de la résidence principale qu’il vient d’acheter grâce à un prêt bancaire ; il est mis en liquidation judiciaire un an plus tard. La banque prêteuse déclare sa créance et, faisant valoir que cette créance est antérieure à la déclaration d’insaisissabilité, elle demande au juge de lui délivrer un titre exécutoire afin de saisir la résidence
La Cour d’appel de Lyon rejette la demande, estimant qu’aucun texte ne lui permet d’y faire droit.
Cassation de cette décision par la Haute Juridiction. Le créancier auquel la déclaration d’insaisissabilité est inopposable bénéficie, indépendamment de ses droits dans la procédure collective de son débiteur, d’un droit de poursuite sur l’immeuble objet de la déclaration, qu’il doit être en mesure d’exercer en obtenant, s’il n’en détient pas un auparavant, un titre exécutoire par une action contre le débiteur tendant à voir constatés l’existence, le montant et l’exigibilité de sa créance.
Cass. com. 13 septembre 2017, n° 16-10.206, Sté Crédit Lyonnais c/ L. (lien)
DROIT SOCIAL
Revalorisation de l’indemnité légale de licenciement
Le décret n° 2017-1398 du 25 septembre 2017 revalorise le montant de l’indemnité légale de licenciement, mais uniquement pour les 10 premières années d’ancienneté du salarié licencié. Ce texte complète la réforme déjà opérée par l’ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, qui abaisse, de 1 an à 8 mois, l’ancienneté exigée du salarié pour avoir droit à l’indemnité.
Désormais, l'indemnité légale est attribuée au salarié justifiant de 8 mois d'ancienneté ininterrompue au service du même employeur, au lieu d’un an auparavant (C. trav. art. L 1234-9 modifié par l'ordonnance). L’indemnité de licenciement ne peut pas être inférieure à (C. trav. art. R 1234-2 modifié par le décret) :
- un quart de mois de salaire par année d’ancienneté pour les années jusqu’à 10 ans, au lieu d’un cinquième de mois de salaire par année d’ancienneté antérieurement ;
- un tiers de mois de salaire par année d’ancienneté pour les années à partir de 10 ans. Ce taux est inchangé.
Décret 2017-1398 du 25-9-2017 (lien) ; Ord. 2017-1387 du 22-9-2017 art. 39 (lien)
Principales mesures de la réforme du Code du travail
Les cinq ordonnances réformant le Code du travail, signées le 22 septembre 2017 par le président Emmanuel Macron, ont été publiées le lendemain matin au Journal officiel (JO) pour une entrée en vigueur immédiate.
Une partie des mesures s'appliquent dès publication, comme le barème des indemnités prud'homales ou la réforme du télétravail, tandis que d'autres, comme la fusion des instances représentatives du personnel, nécessiteront des décrets d'application, qui seront publiés d'ici au 31 décembre 2017.
La réforme du Code du travail s’articule autour de cinq grands thèmes.
- Les accords d'entreprise
Le gouvernement compte aller bien plus loin que la loi El Khomri dans le champ de la négociation ouvert aux accords d'entreprise. A ce stade, seule la durée du travail est susceptible de déroger à la loi ou aux accords de branche. Demain, les accords dérogatoires pourraient porter par exemple sur les primes spécifiques imposées par certains accords de branche (prime de panier, prime de repas, prime d'équipes....). Une entreprise pourrait ainsi décider de supprimer certaines de ces primes.
Au-delà des thèmes qui pourront être négociés en entreprise, le ministère du Travail a aussi en tête de mieux sécuriser les accords eux-mêmes. En effet, le droit conventionnel est considéré, à juste titre, comme plus fragile que la loi elle-même par les juristes, ce qui peut dissuader certaines entreprises de se lancer dans ce genre d'aventures. Si cette insécurité juridique n'est pas levée, tous les efforts du gouvernement pour développer la négociation en entreprise ne serviraient pas à grand-chose.
- Le dialogue social
Le gouvernement insiste sur le fait que la France est le seul pays à avoir autant d'instances représentatives du personnel, au moins dans les plus grandes entreprises (les délégués du personnel, le comité d'entreprise et le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail). La loi Rebsamen permet déjà à une entreprise de moins de 300 salariés de regrouper ces trois instances en une délégation unique du personnel (DUP). Il ne s'agit pas réellement d'une fusion, car chaque entité conserve ses attributions et ses prérogatives.
Les ordonnances devraient aller un cran plus loin, en fusionnant réellement ces instances. Et en trouvant des mesures qui puissent « faciliter le dialogue social dans les PME », notamment dans celles qui n'ont ni comité d'entreprise (obligatoire au-delà de 50 salariés) ni délégué du personnel (obligatoire au-delà de 10 salariés).
- La « sécurité des relations de travail »
C'est la partie la plus sensible à première vue, et celle qui sera abordée en dernier, puisqu'il s'agit de la barémisation des dommages et intérêts aux prud'hommes (et non la barémisation des indemnités de licenciement, comme l'a souligné le ministère du Travail).
Pour justifier sa mesure, le gouvernement met en avant la prévisibilité dont ont besoin les employeurs en cas de jugement qui leur serait défavorable. Mais aussi l'égalité territoriale, pour éviter que, sur un même licenciement jugé abusif, un salarié ne perçoive six mois de salaire dans un tribunal et douze mois dans un autre. Autre argument avancé : la France serait le seul pays en Europe à ne pas avoir ce type de barème.
Enfin, cette ordonnance doit aussi comporter des assouplissements de « certaines règles qui entourent le licenciement ». Il ne s'agit que des règles formelles. Un juge ne pourrait plus invoquer certains vices de forme pour annuler un licenciement par exemple. Une mesure réclamée depuis longtemps par les employeurs, notamment dans les PME.
- L’assouplissement de l’obligation de reclassement
Le projet d’ordonnance relatif à la prévisibilité et la sécurisation des relations de travail présenté le 31 août 2017 par le gouvernement prévoit que dans le cadre d’un licenciement, le périmètre géographique d’appréciation du motif économique sera national. Le texte prévoit aussi d’aménager l’obligation de reclassement, l’ordre des licenciements ou le régime des plans de départ volontaire.
L’employeur n’aura plus à proposer aux salariés de postes de reclassement à l’étranger. S’agissant des entreprises appartenant à un groupe, celles-ci n’auront plus à proposer de postes de reclassement au sein du groupe que si son organisation, ses activités ou son lieu d’exploitation assurent la permutabilité de tout ou partie de son personnel.
De plus, le gouvernement souhaite mettre en place une nouvelle procédure de « rupture conventionnelle collective », dont l’objectif serait de sécuriser les plans de départ volontaire. Ce dernier devrait notamment déterminer le nombre maximal de départs envisagés, de suppressions d’emplois associées et sa durée de mise en œuvre.
- La soumission d’un projet d’accord directement aux salariés
Enfin, le projet d’ordonnance relatif au renforcement de la négociation collective ouvre à l’employeur la possibilité de soumettre un projet d’accord directement aux salariés. L’employeur devra obtenir un vote favorable à la majorité des deux tiers du personnel pour que l’accord soit valable. Ce mode de négociation sera aussi possible dans les entreprises ayant entre 11 et 20 salariés qui n’ont pas de délégué syndical (DS), mais qui sont également dépourvues de membre élu du comité économique et social (CES), nouvelle instance appelée à se substituer aux délégués du personnel, au comité d’entreprise (CE) et au CHSCT.