Cessions de droits sociaux : nécessité de négocier une garantie d’actif et de passif
Libert Avocats répond à vos interrogations sur la nécessité de négocier et conclure une garantie d’actif et de passif dans une opération de transfert d’entreprise par cession de titres sociaux.
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Lors d’une cession de titres sociaux, qu’il s’agisse de parts sociales ou d’actions, le cessionnaire est potentiellement en position de se heurter à une diminution des éléments d’actif ou à un passif dont il n’avait pas connaissance et dont l’origine est antérieure à la cession, liée à la gestion avant son entrée en possession.
Cela peut se traduire notamment par la diminution de la valeur d’un élément de l’actif ou par l’augmentation d’un passif non quantifiable ou quantifié lors des opérations d’acquisition, dans la documentation chiffrée ou juridique soumise lors des opérations d’« audit » ou de « due diligence ».
Libert Avocats répond à vos interrogations sur la nécessité de négocier et conclure une garantie d’actif et de passif dans une opération de transfert d’entreprise par cession de titres sociaux.
En effet, lors de la cession d’un bloc de contrôle - conférant au cessionnaire la maitrise sur la Société qui encadre l’activité/l’entreprise achetée - les mécanismes classiques de garantie prévus par le Code civil sont très largement insuffisants à sécuriser les droits de l’acquéreur.
En droit français, les titres sociaux ne représentent pas la substance, en elle-même, de l’entreprise cédée.
Aussi, à la différence de l’acquisition d’un fonds de commerce - un bien immatériel - où la garantie d’éviction et/ou des vices cachés peuvent protéger l’acquéreur, en achetant les titres composant le capital d’une Société, les défauts affectant son fonds d’activité ne sont pas couverts par les garanties légales.
En effet, les éventuels défauts de l'entreprise visée par le processus d’acquisition n’affectent pas la substance des titres objet du contrat de vente ; une action ou une part sociale reste bien un bien immatériel dont la valeur peut fluctuer.
Dès lors, une garantie spécifique et contractuelle doit être négociée. Il s’agit des clauses, voire des conventions, de garantie d’actif et de passif.
Une telle garantie compte parmi les actes les plus complexes à négocier dans les discussions afférentes à la transmission d’entreprise, nécessitant pour l’acquéreur et le vendeur de faire appel à des avocats spécialisés dans ce domaine.
Dans un tel contexte, le recours au droit commun, inefficace au cas (I), incite les praticiens tels que les avocats à rédiger des actes complets permettant une meilleure protection des acquéreurs (II).
Les avocats et juristes du cabinet Libert Avocats ont déjà accompagné à de nombreuses reprises, soit l’acheteur, soit le vendeur et ont porté assistance à la négociation et aux intérêts particuliers de l’une ou l’autre partie à l’acte de vente ainsi qu’à la négociation du contrat de garantie d’actif/passif.
I. Cession de titres : insuffisance des garanties communes de droit civil
Lors de l’acquisition d’un bloc de contrôle de titres sociaux, voire de l’intégralité des titres, l’acheteur ne procède pas à l’acquisition de ces droits sociaux ou valeurs mobilières pour ce qu’ils sont mais pour ce qu’ils représentent, c’est-à-dire l’entreprise dont la substance est « contenue » dans le contrat de Société.
Or, les dispositions du Code civil encadrant le droit de la vente ou des biens ne peut atteindre cette subtilité. Les règles classiques du droit ne prennent pas en considération la substance du bien encadré par le pacte social. Au sens strict du droit civil, l’objet de la vente sont les actions et/ou aux parts de la Société.
Dès lors, on mesure la limite des protections offertes par le Code civil à l’acquéreur. La garantie d’éviction et la garantie des vices cachés sont insuffisantes.
- La garantie d'éviction (articles 1626 et suivants du Code civil) a pour objet d'assurer à l'acquéreur la possession paisible de la chose vendue après la délivrance de celle-ci. Elle constitue ainsi le prolongement naturel de l'obligation de délivrance, dont elle assure la pérennité ;
- La garantie des vices cachés (articles 1641 et suivants du Code civil) est proposée par le vendeur à l’acquéreur lors de la conclusion de la vente et s’applique aussi bien aux biens meubles qu’aux biens immobiliers. Cette garantie, qui est d’ordre public, permet au cessionnaire d’être protégé contre les éventuels défauts du bien acheté. Comme son nom l’indique, elle ne couvre que les défauts qui ne peuvent pas être décelés au moment de l’achat.
La jurisprudence considère que la simple disparition d’un élément d’actif ou que le fait que l’activité de la Société soit compromise ne suffisent pas à fonder la garantie des vices cachés. En effet, ces éléments n’affectent pas la substance des parts ou des actions vendues mais seulement leur valeur.
Lors d’une cession de titres, la garantie des vices cachés ne peut être admise que lorsque des éléments affectant la pérennité de l’entreprise rendent impossible l’exercice de toute activité.
On comprend mieux que ces garanties ne peuvent pas fonctionner ou être mises en action sur des titres sociaux.
Aussi, la pratique a imaginé un dispositif contractuel faisant le lien entre les titres sociaux acquis et l’entreprise visée par l’opération d’acquisition.
C’est donc par le truchement d’une construction contractuelle que la volonté des parties exprime, et rappelle, que lors de la cession d’actions ou de parts, c’est en réalité la substance de l’entreprise rachetée qui constitue l’objet de la vente et dont la valeur doit ainsi être garantie.
II. Garantie de valeur des titres acquis : le recours à la garantie d’actif et de passif
Partant de cette inefficacité du droit commun, les parties à une opération de transmission par voie de cession de titres sociaux ont imaginé des clauses particulières devant assurer une meilleure protection des acquéreurs (A), sous respect de certaines conditions (B).
1. La mise en place des clauses de garantie
La construction des conventions de garantie d’actif ou de passif se fait généralement en deux parties : les déclarations puis les garanties proprement dites.
- Les déclarations consistent, pour le cédant, à opérer un certain nombre d’affirmations sur la fiabilité des données juridiques, financières, comptables et fiscales de l’entreprise cédée. Le cédant définit une liste d'éléments caractéristiques de l'entreprise et s'engage à l’égard de son acheteur sur leur réalité.
Ces déclarations de conformité permettent ainsi d’assurer la protection de l’acquéreur en cas de disparition d’un actif ou de la découverte d’un passif antérieurement à la cession. Ainsi, toutes déclarations inexactes ou incomplètes du vendeur donneront lieu à réduction de prix ou à indemnisation. Cette indemnisation prend généralement la forme d’un paiement en numéraire, mais peut également adopter d’autres formes, telles que la relution (paiement en titres sociaux) dans le cadre d’une GAP bénéficiant à un investisseur. - Par ces garanties, le cédant prend l'engagement d'assumer la charge financière subséquente à la diminution de la valeur d’un actif ou à l’augmentation d’un passif, trouvant son origine dans des événements antérieurs à la cession. Par exemple, la garantie peut viser les litiges, procès et contentieux avec les clients ou les salariés de la Société, ou bien encore les redressements fiscaux.
D’une manière générale, la garantie est donnée pour un temps limité, le plus souvent entre 3 et 4 ans – en vue de s’aligner sur la prescription fiscale - à compter, soit de la date de la cession, soit de la date de clôture de l’exercice en cours. A cet égard, il convient de distinguer l’obligation de couverture et l’obligation de règlement. C’est bien l’obligation de couverture qui prend fin à la date d’expiration de la GAP, et non l’obligation de règlement qui, elle, perdure pour les réclamations ayant fait l’objet d’une notification dans le délai de la garantie.
Pour être valides, ces clauses de garantie d’actif et de passif doivent avant tout respecter certaines conditions.
2. Les conditions tenant à la rédaction des clauses de garantie
Dans un premier temps, il est nécessaire de respecter les conditions procédurales des garanties, qu’elles soient d’ordre statutaire ou légale. A titre d’illustration, dans les SA, les cautions, avals ou garanties donnés à un tiers requièrent l’accord du conseil d’administration.
L’action en garantie étant un rééquilibrage objectif de l’opération, elle ne nécessite pas la démonstration ni d’une faute ni d’un préjudice. En pratique, si par exemple la mauvaise foi du cédant est établie, le cessionnaire lésé pourra faire appel à l’obligation légale d’information du vendeur.
Dans un second temps, avec la pratique, s’est développée une certaine exigence quant à la rédaction de telles clauses. Ces conditions ne sont pas d’origine légale, mais elles permettent une plus grande efficacité des garanties et sont très largement admises.
Ainsi, les clauses de garantie d’actif et de passif contiennent communément plusieurs types d’informations :
- L’objet et le périmètre de la garantie : il convient de définir les dommages pouvant faire l’objet de l’indemnisation, ainsi que les cas d’indemnisation : violation des déclarations, violation d’engagements (« covenant »), diminution de la valeur des actifs ou augmentation du passif par rapport aux comptes de référence, cas d’indemnisation spécifiques.
En plus de préciser une durée limitée de la garantie octroyée, il est envisageable d’y attacher un plafond ainsi qu’un seuil de déclenchement ou un seuil de minimis (ce qui correspond à une franchise) ; - L’identité et la qualité du ou des garants : s’agit-il de personnes physique ou morales, d’industriels ou d’un fonds d’investissement, quelle est la surface financière du ou des vendeurs (ce qui soulève d’ailleurs la question de la solidarité entre les covendeurs) ;
- L’identité et la qualité du ou des bénéficiaires garantis : la convention peut bénéficier à la société transmise (on utilise alors une garantie de reconstitution), au cessionnaire (il est fait usage d’une clause de révision du prix) ou aux deux, le choix s’opérant selon des justifications juridiques et fiscales ;
- La garantie de la garantie : elle permet de sécuriser la GAP puisque le cédant garant prend lui-même un garant - sans pour autant que cela ne créé de droit vis-à-vis du cessionnaire - afin de le suppléer en cas d’impossibilité de régler les sommes au bénéficiaire en application du contrat de garantie. Il faut évidemment indiquer la nature de cette garantie - on retrouve classiquement le séquestre ou encore le cautionnement bancaire - et par qui elle est octroyée (par la société mère, par une banque garante, etc.) ;
- La contre-garantie : introduite lorsque le cédant garant est une personne physique, elle assure au cessionnaire contre-garanti le paiement effectif de la GAP en cas de défaillance du cédant, moyennant l’existence d’une action récursoire du contre-garant contre le cédant garant initial ; ce qui en pratique peut se révéler inefficace si le garant initial n’est pas solvable. La contre-garantie peut par exemple être un cautionnement ou une garantie à première demande.
Afin d’actionner la garantie d’actif et de passif, le cessionnaire devra au préalable notifier sa réclamation au cédant garant par la voie d’une mise en demeure, et ce dans un délai imparti. Le cédant pourra ensuite accepter ou s’opposer à la demande du cessionnaire.
Libert Avocats est à votre disposition pour vous accompagner dans la rédaction des clauses de garantie d’actif et de passif, évitant ainsi les mauvaises interprétations pouvant résulter d’une rédaction approximative.
Publié par Libert Avocats