Contentieux prud’homal
En France, environ 180 000 décisions sont rendues chaque année par les Conseils de prud’hommes. Cette juridiction est au cœur de l’appréciation des litiges survenant dans la relation entre employeur et salarié au sein du contrat de travail. Il est important d’en saisir les modalités de fonctionnement.
- Qu’est-ce que le Conseil de prud’hommes ?
- Qui peut saisir le conseil de prud’hommes ?
- Quels sont les litiges concernés ?
- Quand peut-on saisir le Conseil prud’homal ?
- Comment se déroule la procédure ?
Articles relatifs
L’indemnité compensatrice de non-concurrence n’est pas une clause pénale
Service
1.Qu’est-ce que le Conseil de prud’hommes ?
Les règles de la procédure prud’homale sont énoncées aux articles L.1411-1 et suivants du Code du travail. Cette juridiction se caractérise par quatre mots : exception, conciliation, paritarisme et proximité.
Tout d’abord, il s’agit d’une juridiction d’exception, spécialisée dans les litiges qui entourent le contrat de travail. Elle est chargée de régler les conflits individuels entre employeurs et salariés liés à un contrat de travail de droit privé.
De plus, elle est d’exception notamment sur sa composition. En effet, il est important de signifier que cette instance est présidée par des juges non professionnels issus du monde du travail.
Ensuite, cette juridiction prône la conciliation. En effet, à la lecture de l’article L.1411-1 du Code du travail, la compétence principale du conseil de prud’hommes est de régler par conciliation les différends et litiges nés lors de la relation de travail entre salariés et employeurs. Ce n’est qu’à défaut d’accord total suite à la conciliation que le bureau de jugement sera compétent pour juger le litige.
En outre, rappelons que le Conseil de prud’hommes est organisé sous l’égide du principe du paritarisme. En effet, les conseillers prud’homaux sont autant de représentants des salariés que de représentants des employeurs. Cela peut parfois mener à des situations de blocage.
Enfin, la juridiction prud’homale est une juridiction de proximité. Il en existe au moins une par département et on en dénombre au total 210 sur l’ensemble du territoire français. Cela lui permet d’être au plus proche des attentes du justiciable au sein du territoire.
2.Qui peut saisir le conseil de prud’hommes ?
Le conseil de prud’hommes peut être saisi tant par les employeurs que par les employés relevant du secteur privé. La relation de travail doit être au centre du litige.
Le salarié ou, plus rarement, l'employeur qui souhaite saisir cette juridiction doit respecter diverses conditions, notamment en termes de démarches et de prescriptions.
3.Quels sont les litiges concernés ?
Plusieurs litiges peuvent être traités par le conseil de prud’hommes :
- Les litiges liés à un licenciement ou toute autre rupture du contrat de travail ;
- Les litiges liés à des sanctions disciplinaires émises à l’encontre du salarié ;
- Les litiges liés au paiement des primes et salaires ;
- Les litiges liés à la durée de travail (heures, repos, congés) ;
- Les litiges liés aux conditions de travail (hygiène, sécurité) ;
- Les litiges émanant d’une situation de harcèlement (moral ou sexuel) ou de discrimination dans le cadre d’une relation de travail.
En revanche, le conseil de prud’hommes n’est pas compétent pour résoudre un litige portant sur les relations collectives de travail ou qui serait lié à un contrat de travail de droit public.
4.Quand peut-on saisir le Conseil prud’homal ?
Pour qu’un recours devant le conseil de prud’hommes soit admis, il doit être fait dans un certain délai. Au-delà, les faits sont prescrits. Ces délais sont très variables selon la nature du litige, allant de 12 mois pour un licenciement à 10 ans pour des dommages corporels.
5.Comment se déroule la procédure ?
La saisine du conseil de prud'hommes est gratuite. La procédure se déroule en plusieurs étapes :
Le dépôt de la demande
Afin d’être recevable, la demande doit comporter plusieurs éléments :
- Les coordonnées des parties (le demandeur et le défendeur) : nom, prénom, adresse… ;
- L’objet de la demande ;
- L’exposé sommaire des motifs de la demande, qui mentionne l'ensemble des prétentions (sommes réclamées) du demandeur.
La demande du salarié ou, à la marge, de l’employeur doit être adressée par courrier au greffe du conseil de prud’hommes :
- Soit du lieu où est situé l'établissement dans lequel le salarié effectue son travail, du lieu où le contrat de travail a été conclu ou du lieu du siège social de l'entreprise qui l'emploie ;
- Soit du lieu du domicile du salarié si celui-ci ne travaille pas dans l’établissement (par exemple, s’il travaille à domicile).
Plus rarement, la saisine peut également s’effectuer sur place lorsque le salarié et l’employeur se présentent en même temps devant le bureau de conciliation et d’orientation.
La demande est adressée uniquement par voie de requête, c'est-à-dire une réclamation formulée auprès du juge dans le but de régler un différend avec l'employeur / le salarié. Pour ce faire, le salarié devra remplir le formulaire Cerfa n°15586*07. L’employeur remplira le formulaire Cerfa n°15586*06.
La convocation des parties
Les conditions de convocation et ses conséquences sur la procédure prud'homale varient selon le motif à l'origine du litige.
Dans le cas général, suite à la saisine du conseil de prud’hommes, le bureau de conciliation et d’orientation convoque les parties à une séance de conciliation en vue de tenter de mettre fin au litige sans passer par un jugement. Chacune des parties peut être entendue séparément et dans la confidentialité.
La conciliation
Durant la séance de conciliation, qui est fermée au public, chaque partie apporte ses explications sur le conflit.
La représentation n’est pas obligatoire devant le conseil de prud’hommes. Cependant, il peut être avantageux d’avoir un professionnel à ses côtés. Aussi, les parties ont la faculté de se faire assister ou représenter. Plusieurs catégories de personnes sont habilitées à représenter :
- Un salarié appartenant à l’entreprise ou à la même branche d’activité ;
- Le défenseur syndical ;
- Le conjoint, le partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou le concubin ;
- Les représentants légaux d’un mineur ;
- Un avocat.
Si le salarié accepte le versement d'une indemnité forfaitaire de conciliation, le litige prend fin.
En cas d’accord entre les parties, le litige prend fin avec la rédaction d’un procès-verbal de conciliation. En revanche, si aucun accord n’est trouvé ou si l’accord n’est que partiel, l’affaire est renvoyée devant le bureau de jugement.
L’éventuel jugement
En l'absence de conciliation, les parties sont convoquées en audience devant le bureau de jugement, qui se charge de trancher le litige.
Toujours avec la faculté d’être assistée ou représentée, chaque partie présente expose ses arguments durant l'audience, à l'appui de ses demandes. Les parties peuvent se concilier, même partiellement, pendant l'audience.
A l’issue des débats, la décision doit être prise à la majorité absolue des voix des conseillers prud’homaux. Elle est rendue immédiatement ou à une date ultérieure.
Dès lors que le conseil de prud'hommes a statué sur le fond de l'affaire, l'exécution du jugement s'applique. Elle prend effet, au plus tard, le lendemain de la date d'expiration de toutes les voies de recours.
Néanmoins, si la décision n'est pas exécutée, il est possible de :
- Demander au greffe une copie exécutoire du jugement, puis la remettre à un huissier de justice qui pourra procéder, si besoin, à une saisie ;
- Saisir le juge de l'exécution, dans le cadre d'une procédure auprès du tribunal ;
- Si l'entreprise est en redressement ou liquidation judiciaire, obtenir le paiement des sommes dues auprès de l'assurance de garantie des salaires (AGS).
Enfin, concernant les voies de recours, jusqu’à un certain montant de la demande, fixé par décret à 4 000 euros, le conseil de prud’hommes statue en dernier ressort (seul un pourvoi en cassation est possible). Au-delà de ce montant, le jugement est susceptible d’appel. Cet appel implique cette fois une représentation obligatoire.