Clause d'exclusion de garantie attaquée par un tiers dans le cadre d'une action directe mise en œuvre contre un assureur

L’article L.124-3 du Code des assurances prévoit que le tiers lésé peut engager une action directe contre l’assureur de la personne responsable du dommage causé. Le tiers lésé dispose d’un droit propre à l’encontre de l’assureur, en dépit de l’absence de lien contractuel existant entre eux. Ainsi, le tiers lésé peut assigner l’assureur de la personne responsable afin d’obtenir la réparation du préjudice subi.

Ainsi, l’article L.113-1 du Code des assurances dispose que la société d’assurance est tenue d’indemniser le tiers lésé des pertes et dommages causés par la faute de l’assuré. Toutefois, le contrat d’assurance liant la société d’assurance et l’assuré peut prévoir une clause d’exclusion de garantie. Cette clause n’est valide que si elle est formelle et limitée. L’article L.112-6 du Code des assurances permet à la société d’assurance d’opposer une telle clause d’exclusion de garantie à un tiers lésé lorsque ce dernier engage une action directe à son égard.

Jusqu’alors, le tiers lésé ne pouvait contester la validité d’une clause d’exclusion de garantie.

En effet, la Cour de cassation, dans un Arrêt en date du 28 octobre 2003 (Cass. CIV3. 28-10-2003, n°01-13490), soutenait que la contestation du caractère formel et limité d’une clause d’exclusion de garantie était réservée aux parties au contrat d’assurance.

En l’espèce, un acquéreur s’était aperçu que les biens vendus étaient défectueux. Ce dernier avait donc engagé une action en responsabilité des vices cachés à l’encontre du vendeur et de la société d’assurance en garantie.

La société d’assurance se prévalait d’une clause d’exclusion stipulée dans le contrat la liant au vendeur assuré pour ne pas indemniser l’acquéreur victime. L’acquéreur victime contestait la validité de la clause d’exclusion de garantie. Toutefois, la Cour de cassation avait rejeté sa demande au motif que seules les parties au contrat d’assurance pouvaient contester la validité d’une clause d’exclusion de garantie, excluant le tiers lésé.

Cependant, la Haute Juridiction opère un revirement dans un Arrêt non publié en date du 4 mars 2021 (Cass. CIV3. 4-3-2021, n°19-23033).

En l’espèce, un maître d’ouvrage avait agi pour mettre en cause la responsabilité d’un maître d’œuvre et avait également assigné son assureur. L’assureur a donc opposé une clause d’exclusion de garantie au maître d’ouvrage. Le maître d’ouvrage, afin d’obtenir réparation, a contesté cette clause au motif qu’elle n’était pas suffisamment formelle et limitée au sens de l’article L.113-1 du Code des assurances. La Cour d’appel a validé la position de l’assureur, qui avait tiré argument de l’une des clauses d’exclusion du contrat d’assurance.

La Cour de cassation a cassé l’Arrêt d’appel en jugeant que le tiers lésé qui exerce une action directe peut contester le caractère formel et limité d’une clause d’exclusion de garantie même si l’assuré insolvable ne la conteste pas. La contestation d’une clause d’exclusion de garantie n’est plus réservée aux partie au contrat d’assurance.

Ainsi, le tiers lésé peut invoquer la nullité de la clause même en l’absence de contestation de l’assuré. Cela lui permet de débattre de la clause de non-garantie sans que le tiers lésé ne soit contraint de mettre en cause le souscripteur du contrat d’assurance.

Cette décision permet de rappeler le caractère autonome de l’action directe du tiers lésé qui lui permet de contester la licéité des clauses d’un contrat dont il n’est pourtant pas cocontractant.

L’action directe prend ainsi toute sa dimension. Cette action bien menée permet souvent aux tiers lésés de se sortir de mauvaises passes en agissant directement contre l’assureur de la personne responsable du dommage.

Cass. CIV3. 28-10-2003, n°01-13490

Cass. CIV3. 4-3-2021, n°19-23033

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Publié par Libert Avocats

Avocats d’affaires – Paris – Les Sables d’Olonne