Intérêt social et apport frauduleux orchestré par les associés majoritaires

Sommaire

1. La qualification d’apport frauduleux
2. En dehors de toute atteinte à l’intérêt social

1. La qualification d’apport frauduleux

A l’occasion d’une assemblée générale extraordinaire à laquelle une actionnaire minoritaire était absente, les actionnaires majoritaires d’une société anonyme ont approuvé l’apport d’un fonds de commerce et décidé une augmentation de capital social par création d’actions nouvelles au profit de l’apporteur.

L’actionnaire minoritaire étant par la suite décédée, c’est son héritière qui a assigné en responsabilité civile les autres actionnaires et la société ; estimant que cette opération d’apport et d’augmentation de capital avait été réalisée dans des conditions fautives aboutissant à la dilution de ses droits.

En effet, lors de l’opération en cause, le capital social a été sciemment sous-évalué, impactant directement la participation de chaque actionnaire au capital de la société.

En conséquence, au visa de l’article 1382 du Code civil, la Cour de cassation confirme que l’existence d’une collusion frauduleuse des associés majoritaires au détriment de l’associée minoritaire, lui causant ainsi un dommage, est de nature à engager leur responsabilité civile.

2. En dehors de toute atteinte à l’intérêt social

La Haute juridiction juge que, en ne recherchant pas, comme elle y était invitée, si l’opération d’apport coordonnée par les actionnaires majoritaires n’avait pas conduit à priver illégitimement l’actionnaire minoritaire d’une partie de ses droits en diluant sa participation au capital de la société, la Cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1382 du Code civil et du principe selon lequel la fraude corrompt tout.

En effet, la justification d’une délibération sociale approuvant l’apport d’un fonds de commerce, conférant à la société l’avantage de la maitrise d’un nouveau réseau de distribution, ne suffit pas à exclure la fraude des associés majoritaires.

La Cour de cassation fait une application stricte du respect de l’égalité entre associés, même si l’acte d’apport était conforme à l’intérêt social.

Cass. Com. 30 septembre 2020, n°18-22.076